Un simple tunnel devenu un lieu de terreur
Au sud de Kyoto, entre les montagnes boisées d’Arashiyama et la ville d’Atago, se cache un passage que les Japonais évitent dès la tombée de la nuit.
Le tunnel de Kiyotaki, long de 444 mètres — un chiffre considéré comme maudit au Japon —, relie deux routes pourtant banales.
Mais depuis des décennies, il alimente les pires récits de fantômes, de malédictions et de morts inexpliquées.
Construit au début du XXᵉ siècle, le tunnel est aujourd’hui surnommé l’endroit où la lumière ne revient jamais.
Et pour beaucoup, il ne s’agit pas seulement d’une légende urbaine.
Un passé sombre gravé dans la roche

Le tunnel de Kiyotaki a été creusé en 1927 par des ouvriers sous-payés, souvent issus des campagnes pauvres.
Selon les archives locales, les conditions étaient si dures que plusieurs d’entre eux seraient morts pendant le chantier, leurs corps parfois ensevelis dans les parois de pierre.
C’est là que la rumeur aurait commencé : certains habitants affirment que leurs esprits n’auraient jamais quitté les lieux.
Au fil du temps, les témoins se sont multipliés :
- des silhouettes blanches apparaissant dans les rétroviseurs,
- des voitures qui calaient sans raison,
- des mains froides semblant frôler les vitres.
Certains jurent même avoir vu des visages reflétés à la place du leur dans les miroirs du tunnel.
Une série d’accidents qui alimente la peur
Ce qui rend le tunnel encore plus inquiétant, ce sont les accidents répétés sur cette portion de route.
La police de Kyoto recense depuis les années 1970 plusieurs collisions étranges, souvent de nuit, sur un tracé parfaitement droit.
Aucune preuve surnaturelle, évidemment, mais des témoins qui parlent d’une brume soudaine, de phares éteints sans explication, ou d’une voix féminine criant dans le noir.
Le détail le plus troublant ?
Le tunnel mesure exactement 444 mètres, un chiffre considéré comme un mauvais présage (“shi-shi-shi” en japonais, sonorité proche du mot mort).
Pour beaucoup de Japonais, ce n’est pas un hasard.
Quand la légende devient un phénomène culturel
Le tunnel de Kiyotaki est aujourd’hui un symbole du Japon hanté moderne.
Il a inspiré de nombreux films d’horreur, émissions télé et forums de chasseurs de fantômes.
Sur YouTube japonais, on trouve des vidéos d’enquêteurs amateurs qui filment leur passage à travers le tunnel :
certains ressortent en tremblant, d’autres prétendent avoir capté des voix ou des ombres sur leurs caméras.
Pour les habitants, ce lieu fait partie du paysage autant que de la superstition.
Les chauffeurs de taxi de Kyoto évitent de s’y aventurer la nuit, et les jeunes s’y rendent parfois comme on défie la peur, lampe torche à la main, entre fascination et angoisse.
Entre mythe et réalité : ce que dit la science

Les experts qui ont étudié le lieu avancent une explication plus rationnelle :
l’humidité, le manque de ventilation et la faible lumière peuvent altérer la perception visuelle et provoquer des hallucinations légères.
De plus, la configuration du tunnel — long, étroit et en pente — crée un effet d’écho acoustique amplifiant les bruits, ce qui renforce le sentiment d’oppression.
Mais pour beaucoup de Japonais, la science ne suffit pas à effacer la peur.
Le tunnel de Kiyotaki reste une frontière symbolique entre le monde des vivants et celui des esprits, un rappel discret que le Japon moderne n’a jamais totalement quitté son univers spirituel.
Un lieu que les autorités préfèrent taire
Aujourd’hui, le tunnel reste ouvert à la circulation, mais aucune signalisation touristique n’y mène.
Le gouvernement local évite d’en parler officiellement, afin de ne pas attirer un tourisme macabre.
Pourtant, des curieux continuent de s’y aventurer, smartphone à la main, dans l’espoir de capter “quelque chose”.
La nuit, l’endroit est d’un silence absolu.
Aucun bruit de moteur, juste le vent dans la roche et la sensation que quelqu’un vous observe.
Certains ressortent en riant, d’autres avec le visage blême.
Tous gardent en tête la même pensée : ce tunnel n’est pas tout à fait vide.

